En route vers la Conférence Nationale Souveraine –
interview n°2.
A cœur ouvert : le retour d’AMO, le pouvoir d’Ali Bongo
14 Aout 2012
A cœur ouvert : le retour d’AMO, le pouvoir d’Ali Bongo
14 Aout 2012
Nous (Fax1) avons rencontré le Dr Guilou Steeve
Bitsutsu-Gielessen secrétaire exécutif de l’URDP parti politique de
l’opposition Gabonaise membre de la CPPA. Nous vous livrons la deuxième
interview de ce responsable politique Gabonais.
AMO vient de rentrer
sans encombre à Libreville, accueilli par des milliers de sympathisants de
l’UN. Pourtant on anticipait son arrestation par la Justice du pouvoir, voir
une opération de force contre lui et son exécutif. Que se passe t’il à votre
avis dans la tête d’Ali Bongo ?
Je suis secrétaire exécutif d’un parti membre de la CPPA
dont fait partie l’Union Nationale de M. Mba Obame. A ce titre, j’ai rencontré
Mba Obame et je l’ai accompagné à l’aéroport, nous avons eu un entretien. Je
lui ai fait part de mes inquiétudes pour sa sécurité quant à son retour à
Libreville. J’ai vu alors, en face de moi, un homme combatif, déterminé et
résolu. Il a eu pour moi cette petite phrase ; «les vraies choses commencent
aujourd’hui, on n’échappe pas à son destin». Mba Obame était conscient des
risques qu’il courait en rentrant. Il les a pris et les a assumés en faisant
don de sa personne. Pour nous, c’est un signal FORT pour la suite. En
parlant d’Ali Bongo, il est toujours difficile de savoir ce qu’il y a dans la
tête de tout un chacun, je pense néanmoins qu’Ali Bongo a résisté à la branche
dure des faucons de son équipe qui militait pour une arrestation de Mba Obame à
sa descente d’avion. Cette arrestation au-delà de la violence et des risques
d’insurrection qu’elle aurait provoqués aurait été contre-productive pour le
régime voir néfaste.
A peine arrivé, AMO
pose ses premiers actes : grande manifestation le 15 Août et demande de départ
immédiat de Monsieur Maixant Accrombessi. N’est ce pas une solution de facilité
? Le cas de Monsieur Accrombessi est il un cas isolé ?
L’épisode du « Gouvernement du Pnud » et son départ
précipité du Gabon pour raison de santé a suscité dans son camp de nombreuses
interrogations quand à sa capacité à tenir et gagner le combat politique. Mba
Obame absent depuis 14 mois du Gabon a besoin de redynamiser ses troupes et
d’être actif, de dicter un chronogramme de solutions de victoire face au
Bongo-Pdg. Le meeting du 15 Août prochain est une occasion d’annoncer la teneur
du nouveau message. Finis les atermoiements ! Mba Obame face à son miroir sait
mieux que quiconque que ce "nouveau retour" à Libreville est un
Tournant de sa carrière politique et il joue aussi son avenir d'homme d'État.
Finis les jeux de cache cache, les jeux de chat et de la souris du genre
"gouvernement du Pnud". Dès son arrivée à Libreville le réel
s’impose. Le Gabon est par terre: Il y a la dictature d'Ali avec ses Roitelets
et Seigneurs de la guerre et autres Tribalistes ; la Conférence Nationale
souveraine, des élections crédibles, l'Union Nationale, la situation économique
des Gabonais, ce sont des thèmes à traiter d’urgence ...A tous ces défis qui
attendent Mba Obame il faut ajouter le plus terrible de tous et combien le plus
périlleux : La Prise Effective du Pouvoir. Mba Obame n'était-il pas aux dires
de ses partisans " Le Président Élu du Gabon"?
Quant à Accrombessi il concentre à lui tout seul, les tares
et la gabegie de ce régime, ensuite, il est le plus exposé, la face la plus
visible, la plus active du dispositif de l’équipe des « étrangers et
incompétents » qui encadrent Ali Bongo. Dès lors Accrombessi devient le maillon
faible de cette équipe ; ne dit-on pas que « la force d’une chaîne dépend de la
force de son maillon le plus faible ». Et Accrombessi l’a compris c’est
pourquoi il a crée Bilié Bi Nze de façon à ce que ce dernier serve d’interface
et que le débat se déplace autre part que sur sa personne. La stratégie de ce
pouvoir tribaliste c’est de mettre un Fang face à un Fang. Ceci dit, personne
n’a oublié les autres étrangers : de Eric Chesnel à Lee White, Henri Ohayon,
chacun dans sa partition gère une parcelle de la souveraineté du Gabon et par
conséquent devra rendre des comptes…..
Selon vos sources,
combien il y avait de Gabonais présents à son arrivée ? Le bureau de l’AFP à
Libreville a cité quelques centaines avant de se raviser le lendemain et de
parler de 2000 à 3000 sympathisants. Infos Plus Gabon (Reuters) et Deustche
Welle parlent elles de 4000 à 6000. Et l’Union Nationale cite entre 30 000 et
37 000. Quel est votre avis objectif sur ce sujet?
Je ne vais pas rentrer dans une polémique des chiffres. Il y
a un constat qui est là : Mba Obame a été accueilli par une foule nombreuse de
ses partisans qui se sont mobilisés pour donner un éclat à son retour. Les
retours de Mba Obame ou du défunt Pierre Mamboundou ont donné lieu à des
déplacements de partisans de façon spontanée et libre, et, il faut le dire,
sans la contrepartie financière qui encadre les manifestations du PDG. Le
PDG-Bongo est un « parti politique-casino » dont la fidélité à l'argent est un
leitmotiv, qui regroupe des chercheurs d’Or et autres aventuriers du gain
facile. A leur yeux ce genre de manifestation est incompréhensible c’est
pourquoi dans ce cas ils estiment que c’est un « non-évènement » et comme pour
les élections ils sont les maîtres de la manipulation et du bidouillage des
chiffres et ils alimentent de façon scientifique la manipulation de l’information.
Où sont les chiffres du ministère de l’intérieur ?On peut remarquer qu’on
assiste aujourd’hui à une guerre psychologique faite d’annonces,
d’informations, de désinformation et d’attaques personnelles entre le pouvoir
et l’opposition. C’est une façon subtile de dérouter la violence sociale et
politique sur le terrain de la communication plus contrôlable. Pour le pouvoir,
Il vaudrait mieux faire une violence par communiqués qu’une violence
insurrectionnelle. Un communiqué entraîne un contre-communiqué, ça me fait
penser à ce qu’on appelait en France au début du siècle dernier « La guerre des
boutons ».
Quels sont les thèmes
que le Chef de l’Etat pourrait développer dans son discours à la Nation le 16
Août pour tenter de reprendre la main?
Dans son discours du 16 Août, Ali Bongo pour reprendre la
main va servir aux gabonais la bonne soupe soporifique habituelle des Bongo-PDG
: il va remercier les gabonais pour les JO, les musulmans pour le ramadan ; il
va demander au conseil supérieur de la magistrature de mettre en place assez
rapidement la Cour Spéciale pour juger les 92 dossiers d’enrichissements
illicites ; il va proposer aux Gabonais de réformer les institutions et ce,
motivé par les exigences de l’émergence ; il va confirmer que le Gabon n’est pas
en crise donc exit la conférence nationale ; il va proposer aux Gabonais un
prochain gouvernement de large ouverture ; il va réaffirmer la dérive
dictatoriale et répressive de son régime en mettant en garde les médias
citoyens, les partis de l’opposition, la société civile libre, qu’en cas de
manquement à l’Etat de droit, « force reviendra à la Loi »……
Comment s’annonce la
Conférence Nationale Souveraine qui est ardemment voulue par AMO et l’UN ? Les
partis politiques d’opposition ont-ils clairement pris position sur le sujet ?
Les Gabonais et les partis politiques de l’opposition
notamment l’URDP et la CPPA se sont déjà appropriés ce processus de Conférence
Nationale. Tout le monde veut de cette Conférence Nationale, même le parti au
pouvoir. La situation est intenable politiquement et les risques de dérapage
sont réels. Il faut cependant sortir du prisme réducteur du duo Amo/Ali. Le
Gabon n'est pas la chasse Gardée de André Mba Obame et non plus la propriété de
Ali Bongo Ondimba. Nous ne Sommes pas Les Otages des Héritiers d'Omar Bongo. La
Conférence Nationale souhaitée de tous nos vœux donne lieu à une
incompréhension voire à une cacophonie. Nous la souhaitons, cette conférence,
comme un Frein à la Dérive Dictatoriale dans laquelle le Gabon glisse inexorablement
et un Exutoire à la Violence. Aussi et surtout, cette conférence doit remettre
nos Institutions et le Climat Politique aux Standards Démocratiques et
permettre enfin au Peuple Gabonais d'avoir une Assemblée Nationale qui
corresponde à ses choix. Cette Conférence Nationale n'est pas une Tribune de
Règlement de Comptes ou un "REMAKE" du contentieux électorale de 2009
et encore moins une Occasion pour le Pouvoir d'Affirmer sa Dictature. Cette
Conférence Nous ne la Mendions Pas, Nous l'EXIGEONS.
Quels sont les
objectifs de cette Conférence Nationale Souveraine ?
Cette conférence doit remettre le peuple au centre du jeu
politique, afin de lui rendre sa souveraineté et sa légitimité sans cesse
bafouées depuis 45 ans. Pour cela il faut remettre à plat nos institutions,
rédiger une nouvelle Constitution, instaurer un État de Droit où chacun se
reconnaitra, bien mettre en place et garantir tous les éléments de la
crédibilité d’une élection. Elle doit nous permettre de réinventer le
futur de notre pays, de mettre tous les compteurs à Zéro! Et de nous donner les
moyens d'assurer l'ambition d'une grande Nation. Pouvez vous lister les
maux du Gabon que vous souhaiteriez voir débattus pendant la Conférence
Nationale Souveraine ?Les maux du Gabon sont vastes et variés, la conférence
Nationale Souveraine devra aborder les thèmes suivants : l’instauration de
l’Etat de Droit et des institutions crédibles et respectées ; La transparence
dans la gestion du budget de l’Etat ; un découpage électoral et des élections
démocratiques ; l’arrêt de l’impunité dans les enrichissements illicites ; la
mainmise de la franc-maçonnerie dans les cercles du pouvoir ; la clarification
des évènements meurtriers de Port-Gentil en 2009 ; la redéfinition et le
renforcement de l’Etat-Nation au-delà des replis identitaires ; la transparence
et la visibilité des carrières administratives ; le renforcement de la prise en
charge des Gabonais économiquement faible ; la crise universitaire ; la
corruption et la libre entreprise …..
La Franc maçonnerie
au Gabon est sous l’influence de deux obédiences : la Grande Loge Nationale de
France (GLNF, réputée très affairiste et proche des réseaux d’argent) et le
Grand Orient de France (GODF, réputé proche du Parti Socialiste). Vous ne
faites pas de différences entre elles ?
Comme je l’ai dit dans l’article précédent : Chaque citoyen
est libre de ses convictions religieuses ou ésotériques. Etre franc-maçon est
un choix personnel. Au Gabon il est connu de tous que la franc-maçonnerie est
instrumentalisée dans le but de canaliser les élites et les têtes qui
dépassent. Ses obédiences profitent de la misère et de la pauvreté matérielle
des élites en leur faisant miroiter moyennant une adhésion un cursus
honorum. Au Gabon nous ne faisons pas la différence entres les maisons
mères françaises et la franc-maçonnerie Gabonaise. De nombreux francs-maçons au
Gabon sont des voyous et ils sapent l’image de toute la franc-maçonnerie. Il
est de l’obligation des Obédiences Françaises (Grand Orient et GLNF) de mettre
de l’ordre dans leurs succursales Gabonaises. Il faut séparer le bon grain de
l’ivraie, au Gabon nous avons plus droit à l’ivraie. Nous savons que les
réseaux maçons français et Gabonais sont le cœur de la Françafrique et les
maîtres des réseaux des facilités de fuites de capitaux voire des Biens Mal
Acquis. Il serait souhaitable que lors de la Conférence Nationale souveraine ce
débat soit engagé de façon démocratique et libre.
Cette Conférence
Nationale Souveraine ne pourrait elle pas susciter de nouvelles vocations politiques,
et par la même induire un changement clair de génération contre le microcosme
politique actuel qui a montré ses échecs principalement dus à ses
compromissions avec le pouvoir?
Si cette conférence Nationale donne droit à un nouvel
exécutif, il est fort probable qu’elle va engendrer une nouvelle classe
politique. La question des Biens Mal Acquis qui ne se limite pas aux seuls
Bongo devra être traitée de façon la plus large possible dans cette conférence.
Au-delà de la clarification des détournements illicites, cela permettra de
délimiter la ligne de séparation entre l’ancienne classe politique et la
nouvelle.
Comment la Conférence
Nationale Souveraine pourrait elle permettre à de nouveaux citoyens de prendre
la parole et d’exprimer leurs vues pour un Gabon meilleur ? Qui financera cette
Conférence Nationale Souveraine ? Quelles assurances que les orateurs pourront
s’exprimer librement sans crainte pour leur avenir professionnel ?
Pour rappel, en 1990, la conférence nationale se limite
"à un face à face entre politiques" la société civile se réduit
essentiellement à un syndicat affilié au parti unique, absence d'ONG, et
d'associations. Cette conférence Nationale se présente comme une faveur du
pouvoir en place, dès lors, sa souveraineté est mise en sourdine. La classe
politique de l'époque crie victoire dès que cette conférence instaure le
Multipartisme intégral et immédiat et de fait, elle est peu regardante du
devenir de toutes les autres décisions prises. La suite on la connait...quatre
ans plu tard il faudra renégocier à travers les accords de Paris. En
prenant appui sur l'Histoire de notre pays, la conférence de 2012 sera
souveraine parce que NATIONALE: toutes les décisions prises devront avoir une
application immédiate; des observateurs et un observatoire international; un
modérateur neutre avec une assise internationale avérée (exemple Koffi Annan
voire un Jerry Rawlings) ; Permettre un accès libre à toutes les composantes de
la Nation : syndicats, société civile, partis politiques, diaspora gabonaise,
les associations, et ONG.... les PME, les Femmes...; Permettre une expression
libre dans les débats et une liberté de la presse....Tous les travaux et
décisions prises dans cette conférence seront sous le sceau de la souveraineté
et l’immunité. Cette conférence nationale devra être financée sur le budget de
l’Etat Gabonais avec l’aide financière de nos partenaires pour la démocratie au
Gabon et l’assistance d’institutions internationales.
Quelle est votre
vision d’un « pays normal » pour le Gabon au sens du Président François
Hollande, qui apparaît pour les observateurs comme le facilitateur du processus
de la Conférence Nationale Souveraine du Gabon ?
Comme je l’ai souligné plus haut cette conférence est une
exigence de l’opposition gabonaise pour les raisons citées. François Hollande
en remettant à Ali Bongo le document de sortie de crise concocté par
l’opposition gabonaise et la société civile s’est érigé de facto comme
facilitateur. En dehors des « durs » du régime qui sont d’ailleurs les ayants
droits et des privilégiés, le bilan des trois premières années d’Ali Bongo a
fait plus de déçus au sein du PDG que nulle part ailleurs. Ces PDGistes déçus
et mécontents sont partie prenante pour cette conférence
Nationale. J’irais plus loin, je pense que le Président Ali Bongo y est
aussi favorable dans la seule probabilité que : d’une part, elle ne doit pas
être présentée comme un Diktat de l’opposition Gabonaise associée à la France
de Mr Hollande ; et d’autre part, cette Conférence Nationale ne remette pas en cause
sa présidence ni son septennat. Mais à l’impossible nul n’est tenu, une
Conférence Nationale Souveraine on sait comment l’initier mais par suite il est
impossible de la contrôler : C’est le « Hic »…Quant à Ma vision pour que le
Gabon soit un « pays normal » ; c’est d’abord l’alternance démocratique, un
président élu par les citoyens ; La gestion saine et visible de nos finances
publiques ; l’arrêt de l’impunité des détourneurs de fonds public ; La
démocratie et la justice sociale pour tous …. Je vous remercie.
Le 14 Aout 2012.
Ceci clôt notre deuxième entretien avec le Dr Guilou Steeve Bitsutsu-Gielessen secrétaire exécutif de l’URDP parti politique de l’opposition Gabonaise membre de la CPPA. Nos prochains invités seront des responsables de l’Union Nationale et de l’UPG.
Ceci clôt notre deuxième entretien avec le Dr Guilou Steeve Bitsutsu-Gielessen secrétaire exécutif de l’URDP parti politique de l’opposition Gabonaise membre de la CPPA. Nos prochains invités seront des responsables de l’Union Nationale et de l’UPG.
En route vers la Conférence Nationale Souveraine au Gabon.
Interview exclusive du Dr Guilou BITSUTSU-GIELESSEN, Secrétaire Exécutif de
l’URDP (membre de la CPPA).
Le 19 Juillet 2012
Nous (Fax1) avons interviewé Monsieur Guilou
BITSUTSU-GIELESSEN Secrétaire Exécutif de Union Républicaine pour la Démocratie
et le Progrès (URDP) parti de l'opposition Gabonaise membre de la Coalition des
Partis Politiques pour l'Alternance (CPPA).Monsieur Guilou BITSUTSU-GIELESSEN a
participé à la réunion de restitution des travaux préparatoire de la récente
Rencontre de Paris le 14 Juillet dernier et a été interviewé depuis par le Dr
Mouketou dans son émission sur INRI Radio / The Jack Roger Show. Il ré
interviendra ce soir sur cette radio, confronté à Monsieur Hermann Kamonomono,
Secrétaire général du PDG-Etats-Unis.
En résumé :
Les Bongo sont la cible mais l'objectif est ce système
criminel d’un autre âge. Au Gabon on est tenté d’imaginer qu’il faut un
président qui ne soit pas franc-maçon. Les leaders de l'opposition actuelle
sont et ont été les éminences des réseaux parallèles. Sans renouvellement des
élites dans la Haute Administration il n’aura pas de rupture. Les acteurs
politiques : nous devrions être un relais de la pression populaire et nous
engager à être les garants du respect de l'État de Droit. Les Gabonais se sont
déjà appropriés ce processus (de Conférence Nationale).La situation est
intenable politiquement et les risques de dérapage sont réels. Elle doit être
le socle de l'avènement de la deuxième République Gabonaise et de la rupture de
45 ans de dictature. Cette Conférence Nationale est le seul exutoire à la
violence.
Bonjour Monsieur BITSUTSU-GIELESSEN. Merci de présenter
rapidement l’URDP que personnellement je ne connaissais pas.
L’URDP (Travail-Justice-Patriotisme) est présidé par Jean
Marcel Mallolas professeur de Droit Public, assisté par Alain Engouang chef
d’entreprise, et moi-même. Je suis enseignant en Histoire à l'IFSP (Institut
des Finances et des Sciences Politiques) de Libreville. Après les
élections de 2009 et mon refus personnel d'adhérer à l'Union Nationale, je
prends la tête de l’URDP, parti d'opposition créé dans le sillage de la
conférence nationale de 1990 et j'imprime ma marque.
Quel est l'ancrage de l'URDP en terme géographique et
d’élus locaux?
L'ancrage se situe dans 5 des 9 régions du Gabon. Ayant
boycotté les dernières élections législatives avec l’ensemble de l’opposition,
pour l'instant nous n’avons pas d’élu local. Ce parti était en état
d’hibernation, nous sommes actuellement en train de le faire revivre.
Un micro, non
- un nano parti! En quoi est il utile dans le paysage politique actuel?
Il est micro c’est vrai mais il grandit. Il est utile car
géré par des hommes vierges de toutes compromissions avec les Bongo-PDG. Il
n’est pas un parti anti-Bongo mais plutôt antisystème Bongo-PDG. Avec une
audience jeune et fraiche.
Expliquez nous la notion de parti anti-Bongo vs parti
anti système Bongo-PDG. En quoi consiste concrètement le système Bongo?
Les partis anti-Bongo sont des partis d’opposition de
personnes et non d'idées. Ils ont pour la plupart participé à des gouvernements
de large ouverture sans imprimer la marque du changement ou de la rupture et la
plupart de leurs leaders sont issus du grand parti Etat qu’était le PDG. Ces
gens là ont été tellement bercés et formatés par le système qu'on peut craindre
qu'ils le reproduisent une fois portés aux affaires. Maintenant nous les anti
système, nous pensons que les Bongo ne sont que la personnification d'un mal
profond qui faut rompre définitivement. Les Bongo sont la cible mais l'objectif
est ce système criminel d’un autre âge.
Comment ce système criminel s'auto-entretient il?
Le système s'auto entretient par la fidélité à l'argent et
au gain facile, par des réseaux ethniques et familiaux. Etre franc-maçon est un
atout. Ensuite, par l'accaparement du bien public par une clique restreinte
autour des Bongo et qui par la suite redistribue les rôles et les prébendes.
Quels peuvent être les moyens pour le peuple gabonais
d'être parti prenante du débat public, et en capacité de contrôler l'action de
leurs élus?
Il y a aujourd’hui un gros travail à faire au sein du peuple
afin de lui rendre sa souveraineté et sa légitimité sans cesse bafouées depuis
45 ans. Pour cela il faut remettre à plat nos institutions, rédiger une
nouvelle Constitution, instaurer un État de Droit où chacun se reconnaitra,
bien mettre en place et garantir tous les éléments de la crédibilité d’une
élection . Quand le peuple saura qu'on respecte ses choix politiques et sa
parcelle de pouvoir que lui offre le suffrage universel, alors je pense que le
peuple pourra avoir la place qu’il lui revient dans le débat public et le
contrôle de ses élus.
Est il réalisable de contrôler / surveiller ses cercles
notamment francs maçons, qui créent manifestement un état dans l'état?
Chaque citoyen est libre de ses convictions religieuses ou
ésotériques. Etre franc-maçon est un choix personnel. Au Gabon il est connu de
tous que la franc-maçonnerie est instrumentalisée dans le but de canaliser les
élites et les têtes qui dépassent. Ses obédiences profitent de la misère et de
la pauvreté matérielle des élites en leur faisant miroiter moyennant une
adhésion un cursus honorum. Le chantage se résume ainsi : "Si vous êtes
avec nous on vous donne ça parce que nous contrôlons ça et vous ferez ça pour
nous". Quel signal donne t-on au peuple Gabonais quand le Président sitôt
après avoir prêté serment devant la Constitution prête ensuite serment en tant
que chef de tous les francs-maçons ? Au Gabon on est tenté d’imaginer qu’il
faut un président qui ne soit pas franc-maçon. La méritocratie, la transparence
et la démocratisation des postes et les fonctions dans l'administration
publique et des leviers du pouvoir signera la fin de leur emprise.
Cette analyse sur ces réseaux parallèles a t'elle été
reprise dans la déclaration de la rencontre de Paris du 30 Juin / 3
Juillet?
Je n'en ai pas connaissance, la rencontre de Paris a été
axée sur la conférence nationale que l'on souhaite de nos vœux : la refonte des
institutions et le mode des élections. On est toujours dans l'anti Bongo-PDG
mais pas assez dans l'antisystème. En effet, les méfaits que sont les
"cercles" et autres réseaux au Gabon sont le cœur du système. Mais,
soyons positifs, c’est un bon départ.
Puisque ceci est un phénomène connu, pourquoi cette idée
n’a pas été reprise?
Parce que simplement les leaders de l'opposition actuelle
sont et ont été les éminences des réseaux parallèles. Ils les entretiennent
toujours mais à leur fins. Aussi, il faut au préalable l’amorce d’un
renouvellement de la classe politique.
Donc, vous souhaitez que de nouveaux responsables
intègrent l’administration de l’Etat. Ces ressources humaines en quantité et en
qualité existent-elles pour refonder cette ossature ?
Sans renouvellement des élites dans la Haute Administration
il n’aura pas de rupture. L’administration gabonaise est un gage au népotisme,
les ressources humaines existent et foisonnent mais elles souffrent de
l’indifférence des gens du pouvoir. Elles seront très vite mobilisables pour la
reconstruction.
La fonction publique étant déjà largement en
surnuméraire, que faites vous des fonctionnaires en surplus ?
La fonction publique gabonaise n’est pas en surnuméraire, je
dirai plutôt qu’il n’y a pas de politique de recrutement ni de plan ou de suivi
de carrière. Il y a des administrations avec un trop plein et d’autres avec un
vide, notamment dans les agents d’encadrement. Il faudra rationaliser tout ça !
Pour revenir aux réseaux opaques, comment la pression
populaire pourrait elle les inciter à avoir un comportement dans le respect des
institutions de l'Etat? Est-il illusoire de vouloir contrôler ses réseaux ?
L’Etat de Droit et son respect sont la clé de voûte du
respect des institutions. Les réseaux opaques sont les enfants de la
corruption, il faut combattre la corruption pour les contenir. Mais vous savez
que dans tous les pays ces réseaux opaques existent.
Comment la population gabonaise pourrait elle agir
concrètement en tant que contre pouvoir? Comment s’informe-t-elle ? La
population gabonaise est mal informée et sous-informée. En tant que contre
pouvoir au sens démocratique du terme, il lui est quasiment impossible
d’exister, sauf à faire acte de violence, consécutif à une manifestation de
masse.
Vous paraît-il possible et faisable d'éveiller les
consciences? Si oui, comment?
Nous, les acteurs politiques, nous devrions être un relais
de la pression populaire et nous engager à être les garants du respect de
l'État de Droit. Nous devons nous armer de patience et de pédagogie pour la
transmission de notre message. La tolérance et le respect des uns et des autres
dans un pays multiethnique est un gage d’éveil des consciences et affermit la
nation. Aujourd’hui, quand je vois ce bouillonnement sur les réseaux
sociaux de ces jeunesses gabonaises, j’ai l'intime conviction que l'éveil est
en marche. Les réseaux sociaux sont un véhicule d’échanges unipersonnels qui
fait abstraction de l’origine ethnique ; c’est un élément fédérateur. Ils nous
font oublier l’absence et la censure des circuits classiques de relai de
l'information.
Quelle est selon vous la répartition entre les gabonais
du Gabon et les Gabonais de l'extérieur sur les réseaux sociaux?
J’ai été surpris de recevoir un message email d'un de mes
anciens élèves de 1996. Dans la discussion il me dit qu’il est à Lambaréné où
il vit maintenant. Je lui ai demandé s’il y avait internet là bas. Il m’a
répondu de façon évidente "bien sûr". Détrompez vous, internet se
propage au Gabon à une vitesse grand V et tous les gabonais y plongent pour
avoir les infos qu'ils n'ont pas des chaînes publiques. La tendance est en
train de s'inverser entre les nationaux utilisateurs des réseaux sociaux et la
diaspora.
Comment les messages sont ils in fine portés aux gabonais
du Gabon, qui représentent la plus grande proportion?
Tous les partis politiques de l'opposition ont aujourd’hui
un Monsieur Internet afin de les informer et de véhiculer leurs messages. Ils
sont tous là dans l’internet sous des pseudos et la population suit le
mouvement. Comme je l’ai dit, Internet est en train de contrer la censure et
l'absence d'espace d'information démocratique.
Avez-vous une idée du taux de pénétration d'internet au
Gabon?
Le taux de pénétration est légèrement inférieur au taux de
pénétration du téléphone portable. Tous les opérateurs proposent des offres
d'appels adossés à une offre de connexion internet. Les prix d'abonnement ont
beaucoup baissé et s'alignent sur ceux du Mali. De plus, la fibre optique a
fait son apparition. La société de consommation fait le reste. Avec de tels
canaux d'information, le bouche à oreilles est le relai final. Ne pas oublier
qu'on est en Afrique !
Donc vous êtes confiant sur la transformation des actions
d'éveil et de sensibilisation qui sont menées actuellement sur Internet en
actions concrètes sur le terrain?
Tout à fait, Je suis confiant sur la sensibilisation via
internet et les réseaux sociaux (Facebook, Twitter) et des blogs comme le
vôtre.
Dernière question : Quelles sont pour vous les chances de
succès de cette nouvelle conférence nationale ? Quelles assurances avez-vous
que les problèmes que vous avez indexés seront effectivement traités ? Que les
populations pourront réellement exercer leurs droits à s’approprier ce
processus, et à y participer?
Tout le monde a en souvenir les élections de 2009, la
contestation et la violence qui s’en est suivi. Personne ne prendrait le risque
de revivre ça ! Les Gabonais savent ce qu’on leur a volé lors de ce scrutin, la
preuve : le taux d’abstention 92% lors des élections législatives de 2011 qui
en dit long. Par conséquent, ils se sont déjà appropriés ce processus. Tout le
monde veut de cette Conférence Nationale, même le parti au pouvoir. La
situation est intenable politiquement et les risques de dérapage sont réels. En
cas de dérapage, le pouvoir a tout à perdre vu qu’il possède tout. Aussi, le
contexte politique s’y prête notamment avec l’arrivée de la Gauche française
aux affaires avec un Président qui a donné le ton lors de l’entrevue le 5
juillet avec le Président Gabonais.
Pour conclure cet entretien, souhaitez-vous revenir sur
un sujet que nous avons évoqué ensemble, ou souhaitez vous ouvrir une autre
perspective?
Le Gabon est à la croisée des chemins, ça passe ou ça
explose! La seule issue propre, honorable et pacifique au problème du blocage
politique du Gabon est une Conférence Nationale Souveraine d'un genre nouveau
en faisant abstraction de toute fanfaronnade et de tout opportunisme politique.
Elle doit être le socle de l'avènement de la deuxième République Gabonaise et
de la rupture de 45 ans de dictature. Cette Conférence Nationale est le seul
exutoire à la violence... Que chacun prenne ses responsabilités devant
l'Histoire. Je vous remercie.
Merci pour cet entretien de qualité. Nous reviendrons
vers vous au cours de ce processus patriotique et républicain, pour reprendre
le pouls de la situation.
Fax1, Le 18 Juillet 2012 – édité le 19 Juillet 2012.
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